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vendredi 2 février 2018

Le masochisme mal compris de Nietzsche

Nietzsche, le seul philosophe lu sans la contrainte de l'école ! Juste pour le plaisir, d'où une liberté avec ses livres, lus comme des recueils de vérités à citer, des leçons de vie.
Exemple, le fameux « ce qui ne me tue pas, me rend plus fort », une manière de résilience, d'appel à tenir bon. Mais il y a danger de s'égarer si on le lit au pied de la lettre. Dans cette célèbre formule,  je vois autre chose, un appel à aller au devant des épreuves douloureuses, aux mises à l'épreuve, ce qui correspond chez lui, Nietzsche, à l'idéal du « bourreau de soi-même », qui en redemande en matière de punitions. Dans sa seconde Intempestive, il termine l'avant propos sur un « qu'on me corrige publiquement », en effet il ne publie ces propos risqués contre la mode historienne, dit-il, que pour le douteux plaisir de se faire éreinter, en en public, de même que son héros permanent, Jésus de Nazareth, revient à Jérusalem pour subir les épreuves du fouet, de la couronne d'épines et de la crucifixion, et cela délibérément (il réprimande Simon Pierre qui cherche à l'en dissuader),  afin d'accomplir un destin sacrificiel qui « rachète les péchés des hommes ». Quel plaisir peut-il y avoir à se faire éreinter, d'autant plus qu'il l'a été après sa Naissance de la tragédie... Mais le provoquer de son plein gré est une manière d'affirmation, sinon l'affirmation par excellence, celle où le destin se retourne en volonté, en "surpassement". La limite du possible, ne rien pouvoir contre le "cela a été", recule d'autant, par le sortilège du masochisme. 

Sur un plan existentiel, même démarche, Nietzsche est l'homme qui affronte gratuitement des épreuves  par bravade, ainsi de cette marche tête nue sous la pluie, pendant sa scolarité, par discipline poussée jusqu'à la caricature, où il contracte une pneumonie,  ou cette autre fantaisie autodestructrice où il continue à chevaucher alors qu'il a pris un coup violent du pommeau de sa selle dans le plexus, causant une infection due aux esquilles d'os, et qu'il refuse de faire soigner. Sa biographie (Kurt Paul Janz) montre la source et la puissance de ses tendances masochistes, d'où procède son éloge constant de la cruauté (généalogie de la morale).  
Il se renforce donc des dangers mortels qu'il affronte par goût, il les cherche! Le secret de son énigmatique volonté de puissance résiderait-il dans des attitudes à double sens, pleines d'équivoque et de duplicité, qui sont propre à l'homme Nietzsche, au personnage vivant, souffreteux, écorché vif, bien loin des images d'épinal du surhomme invincible? 

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